La loi du 26 juillet 2005 a introduit la possibilité, déjà reconnue par la jurisprudence, d’étendre la procédure collective à une personne juridique autre que celle à l’encontre de laquelle la procédure est initialement ouverte, alors même que la première n’aurait pas la qualité juridique requise par la loi pour y être soumise.
Aux termes de l’article L. 621-2 du Code de commerce, il existe deux causes d’extension de la procédure collective :
– la fictivité de la personne morale (il s’agit d’une société de façade créée de manière artificielle sans autonomie juridique, ni de fonctionnement ; elle n’existe que pour servir les intérêts d’une autre personne, physique ou morale, dont elle ne se distingue pas) ;
– la confusion de patrimoines, caractérisée alternativement par une imbrication inextricable des patrimoines ou par l’existence de flux financiers anormaux ou de relations financières anormales.
Dans un arrêt récent du 26 juin 2015, la chambre commerciale de la Cour de cassation a eu à se prononcer sur le fait de savoir si, pour caractériser des relations financières anormales constitutives d’une confusion de patrimoine, les juges du fond doivent rechercher si celles-ci ont augmenté le passif du débiteur au préjudice des créanciers.
En l’espèce, une SARL est mise en redressement puis en liquidation judiciaire.
Le liquidateur assigne une SCI afin de lui étendre la procédure, au motif que l’extension reposerait sur l’existence de flux financiers anormaux caractéristiques d’une confusion de patrimoine.
La demande est accueillie par la Cour d’Appel.
L’existence de ces flux financiers anormaux, caractéristiques d’une confusion de patrimoine, était en l’espèce établie, notamment par le fait que la SCI avait procédé à une majoration artificielle du loyer, dont la SARL lui était redevable, ainsi que le financement exclusif, par la SARL, de travaux qui n’ont finalement pas été réalisés.
En outre, la gérante de la SARL était la même gérante que celle de la SCI.
La SCI forme un pourvoi en cassation en arguant que la seule condition nécessaire pour qu’un flux financier soit caractérisé d’anormal est que ce flux financier augmente le passif de la société en liquidation et que cela cause un préjudice aux créanciers.
La Cour de cassation rejette le pourvoi.
Selon elle, « pour caractériser des relations financières anormales constitutives d’une confusion de patrimoines, les juges du fond n’ont pas à rechercher si celles-ci ont augmenté, au préjudice de ses créanciers, le passif du débiteur soumis à la procédure collective dont l’extension est demandée ».
Par cet arrêt, la Cour de cassation rappelle qu’il relève de la libre appréciation des juges du fond le soin de relever les éléments établissant une confusion des patrimoines.
Néanmoins, il ne leur incombe pas de rechercher si les éléments qui résultent des relations financières anormales participent à une augmentation du passif du débiteur, le préjudice subi par les créanciers n’étant pas un critère décisif dans la qualification de « l’anormalité » de telles relations.
Cass. Com., 16 juin 2015, n°14-10.187