L’article L. 651-2, al. 1er du Code de commerce, applicable dans le cadre du droit des procédures collectives, qui octroi au juge le pouvoir d’apprécier le montant de l’insuffisance d’actif à mettre à la charge du dirigeant, contrevient ainsi au droit commun de la responsabilité civile qui exige une proportionnalité entre la faute commise et le préjudice.
En l’espèce, la Cour d’appel de Riom avait retenu la qualité de gérant de fait d’un dirigeant de société placée en liquidation judiciaire et l’avait condamné, outre au comblement de la totalité de l’insuffisance d’actif, à une peine d’interdiction de gérer de 5 ans et à combler l’intégralité de l’insuffisance d’actif de la société en liquidation judiciaire en raison de ses fautes de gestion (octroi d’une rémunération excessive au regard de la situation économique de l’entreprise, absence de recouvrement des factures impayées, dissipation des actifs de la société avant l’ouverture de la liquidation pour un passif supérieur à 600 000 euros, utilisation des biens et des salariés de la société comme ses biens propres).
Le dirigeant considère cette sanction disproportionnée, notamment compte tenu du fait qu’il ne pouvait être tenu pour responsable de l’intégralité de l’insuffisance d’actif, et forme un pourvoi en cassation.
La Cour de cassation rejette le pourvoi en rappelant les principes de l’article L. 651-2, al. 1er du Code de commerce en vertu duquel les juges du fond ont la faculté, en cas de faute de gestion ayant contribué à une insuffisance d’actif, de « décider que le montant de cette insuffisance d’actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d’entre eux, ayant contribué à la faute de gestion » considérant en outre que les fautes de gestions retenues par les juges du fonds étaient justifiées.
Les juges ont donc tout loisir, en tenant compte des circonstances de l’espèce, de condamner un dirigeant au comblement de l’insuffisance d’actif dans son ensemble, quand bien même le dirigieant de fait ne serait pas le seul fautif.
Quant à l’interdiction de gérer, les juges de la Cour de cassation notent que la Cour d’appel a retenu de nombreuses fautes de gestion justifiant cette décision, le dirigeant ayant sciemment apauvri la société.
C’est donc dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation et sans disproportion que la Cour de cassation a approuvé la décision des juges du fond qui l’avait condamné à 5 ans d’interdiction de gérer et à combler l’intégralité de l’insuffisance d’actif de la société en liquidation judiciaire.
La sanction personnelle envers le dirigeant de fait qui est importante dans cette espèce peut s’expliquer au regard des montants en jeu et des fautes graves de gestion commises : passif d’un montant de 600 000 euros pour un actif subsistant au jour de la cessation des paiements de 3 860 euros.
Cass. Com., 20 avril 2017, n°15-23600